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bruno se lance
30 octobre 2020

Souvenir de bizutage militaire

Je suis viscéralement contre toute forme de bizutage.

Ce souvenir, vieux de 40 ans et rarement réveillé, m’est revenu à la lecture d’un article de Sébastien Dieguez dans Cerveau&Psycho « Pourquoi écoutons-nous si peu nos convictions » inspiré par l’étude de la fable ’’Le renard et les raisins’’ de La Fontaine. Il écrit au milieu de l’article « La dissonance cognitive nous conduit souvent à réévaluer la valeur de ce que nous vivons...Les étudiants apprécient en effet beaucoup plus le groupe dans lequel il parviennent à être inclus lorsqu’ils ont subi un bizutage intense plutôt que léger... ».

Donc à l’été 1981, j’étais militaire à Montargis élève aspirant. Nous étions une soixantaine et la compagnie était composée de trois sections de 18 gaillards (environ). Je me souviens surtout que nous étions six par chambrée. L’instruction pour devenir Aspirant puis futur officier se déroulait principalement en amphi. Le bizutage a commencé dès les premiers jours par des élèves de la promotion précédente à la notre et à un mois d’obtenir leur grade. Nous étions tous avec un bon niveau d’instruction et d’ailleurs le major de ma promotion était déjà diplômé de la meilleure école d’ingénieur télécom de France (j’étais dans l’arme des transmissions). Certains avaient donc des capacités d’instructeur/formateur et nous avaient largement bluffés lors des premiers cours, nous imposant une telle intensité que deux de mes collègues étudiants en fin de deuxième journée avaient décidé de plier bagage (après leur sortie de l’amphi, ils avaient été informés discrètement de la situation de bizutage pour revenir sur leur décision). La dose d’informations à ingurgiter était colossale mais pas insurmontable, ce qui avait plutôt déclenché le rejet était les remarques de « débilité » par les bizuteurs (un peu du style des sitcoms militaires américaines). Les étudiants aspirant étaient pour la plupart motivés par une carrière de manager humain plutôt que de meneur de bétail à l’abattoir. Ces souvenirs reviennent lors de la rédaction, mais voici le plus fort. Après l’arrêt du bizutage en amphi la première semaine, une autre séquence est arrivée au bout d’un mois de présence. Il y eu la préparation de départ de la promotion précédente (il y avait toujours deux promotions entremêlées, l’instruction durant cinq bons mois). Les partants, sans doute un peu alcoolisés par la fête de leur prochain départ avaient décidés de mettre un peu le souk. Vers minuit, ils firent irruption dans plusieurs chambres et choisirent au hasard un lit pour le mettre en cathédrale en quelques secondes et en s’enfuyant en grande rigolade. J’étais le lit du milieu en entrant à droite (3 lits à droite, 3 à gauche, la porte s’ouvrant vers la gauche). Je fus choisit naturellement du fait de ma position dans la chambre. Toute la chambrée a été réveillée, et d’autres chambres aussi (je crois qu’ils l’ont fait à au moins quatre chambres). J’étais déjà anti bizutage et non fêtard/déconneur. Je l’ai assez mal pris et je suis resté affalé dans mes draps, le matelas par dessus la tête et le lit dressé. J’aurais pu tout remettre en ordre, très facilement mais je suis resté prostré. Ce sont mes camarades de chambre qui ont remis mon lit en état alors que je restais assis par terre. Ils m’ont dit de ne pas faire grand cas de cette mésaventure et se sont rendormis bien vite. Je suis resté assis sur mon lit, à ruminer ma future vengeance pendant plus de trente minutes. Dans la pénombre, quand tout était au plus calme, je me suis équipé avec une seule ranger au pied droit et une basket à gauche et en prenant une barre comme une sorte de batte de baseball. Je suis monté à l’étage silencieux comme un fauve en épiant tous les bruits (il y a des militaires qui font des rondes régulièrement dans tous les bâtiments), je crois bien que j’en avais évité un. Les escaliers faisaient deux mètres de large ainsi que les couloirs (nous étions dans de vieux bâtiments et on aurait pu y circuler à cheval). Il y avait un éclairage permanent diffus, du style des lampes d’indication d’issues de secours. J’ai choisit une porte de chambre au hasard mais la plus près de l’escalier. Je me suis placé bien devant, et je me suis concentré/indécis un bon quart d’heure. C’est fou tout ce que j’ai pu échafauder pendant ce temps comme éventualités auxquelles j’aurais à faire face. Et je suppose que tant que je ne me sentais pas prêt à tout, je temporisais tout en continuant à scénariser. Puis d’un coup, ma violence retenue s’est exprimée. Sans avoir aucune pratique d’arts martiaux, j’ai appliqué un coup de pied vigoureux à coté de la poignée de la porte, avec la modélisation dans mon cerveau que je la transperçais sûrement. Et c’est vraiment ce qui s’est passé. La porte s’est ouverte sans résistance, le chambranle en bois à été complètement arraché (je l’ai constaté le lendemain) et elle a violemment frappé le lit qui se trouvait derrière elle (le plus protégé des actions lit en cathédrale). J’étais totalement apaisé en moins d’une seconde et je suis parti en marchant simplement comme un guerrier tueur sûr de sa force, presque déçu de l’absence de réaction. Personne ne m’a suivi, je me suis couché et j’ai très bien dormi. Mais ma vengeance n’était pas assouvie. Au petit matin, j’ai fait exprès de traîner, mes collègues de chambrée pas spécialement étonnés car ils m’avaient vu rester éveillé les poings serrés assis sur mon lit. Ils sont partis à l’heure juste pour le rassemblement matinal obligatoire sur la place d’armes. J’ai fait entorse au règlement en n’y assistant pas, mais j’ai foncé au troisième étage et j’ai ouvert quatre chambres et j’ai foutu en l’air tous les matelas et les draps pliés au carré. Filoutement, j’ai rejoint mes camarades après le rassemblement qui durait environ 10 minutes et à la suite duquel on partait directement en amphi. Peut-être un ou deux se sont rendus compte de mon manège mais n’ont rien imaginé de mon scénario. À la pause de 10H, on avait le droit de passer quinze minutes dans nos chambres. J’ai conseillé mes collègues de chambrée de nous y rendre au plus vite. Quand ceux du troisième étage sont rentrés dans leurs piaules, ils ont crié au scandale et se sont rendus au deuxième étage pour reproduire aux autres chambrées le méfait dont ils étaient victimes. Je ne sais plus comment l’effet domino s’est arrêté. Nos chambres du premier étage n’ont pas été prises dans le conflit car nous les occupions (du moins j’en suis sûr pour la nôtre). Cet épisode a définitivement mis fin au bizutage, et la plupart ont finalement déduis que j’étais un des éléments déclencheur de ces situations. Personne ne m’a plus jamais « fait chier » (je n’étais pas le plus grand et le plus costaud mais pas le plus petit et chétif non plus), et d’ailleurs notre promotion n’a jamais opéré le moindre bizutage à la nouvelle promotion qui nous avait rejoint au bout de trois mois.

Cette dissonance cognitive ne me semble pas suffisante pour accepter le nouveau confinement que j’estime exclusivement être le résultat d’un calcul politique. Les enfoirés aux manettes ne possèdent aucune dose d’empathie. On nous fait subir bien plus qu’un bizutage, une énorme restriction de nos libertés fondamentales. Très certainement la vengeance sera proportionnée, même si la justice ne sera jamais vraiment rétablie. Minus et tous les LREM finiront aux piloris.

Bruno

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